À l'occasion de la seconde édition du Club Les Echos-Digital, co-organisée avec Upper-Link et Valtus à Paris, le 21 juin dernier, Maud Bailly, directrice de la transformation digitale d'AccorHotels, et Sébastien Bazin, PDG du groupe, sont revenus sur la transformation Digitale engagée par AccorHotels.
Avez-vous entendu parler des chariots connectés, qui accompagnent désormais les femmes de chambres et scannent automatiquement les équipements de chaque pièce pour alerter en temps réel les techniciens lorsqu'ils relèvent un dysfonctionnement ? Ou bien du nouveau concept d'hôtellerie Jo & Joe, créé à Hossegor en 2017 et censé déferler sur 50 nouvelles destinations d'ici 2020 ? Ou bien encore du partenariat stratégique entre AccorHotels et le distributeur chinois Ctrip ?
Si vous n'êtes pas sûr, c'est que vous n'êtes pas à jour sur la transformation à l'œuvre au sein du groupe AccorHotels. Une transformation qui passe autant par le digital que par une révision des méthodes de travail qui ont fait le succès de ce groupe employant plus de 250 000 collaborateurs (et qui vient de fêter ses 50 ans d’existence).
Recrutée en 2017 en qualité de « Chief Digital Officer », Maud Bailly, directrice de la transformation digitale, accompagne ce mouvement sur un large périmètre incluant les systèmes d'information, la data, l'expérience client au sens large (CRM, programme de fidélité, réseaux sociaux), le catalogue de solutions aux hôtels, les ventes et la distribution. « Mon rôle est double : offrir à aux clients comme aux propriétaires des hôtels la plus grande proposition de valeur sur le terrain, et faire preuve de pédagogie pour que le digital devienne l’affaire de tous », précise-telle. « Dans un groupe comme AccorHotels, qui est très robuste mais qui n'est pas né digital, il y a en effet un important travail d'acculturation à conduire. »
Pour cette manageuse adepte de la conduite du changement, la transformation digitale du groupe repose autant sur une « feuille de route technologique » que sur « une profonde transformation culturelle » : « Cela nécessite notamment de définir une organisation plus plate, avec des circuits décisionnels plus courts ; d’instaurer de nouvelles façons de travailler en cassant les silos et en encourageant le collaboratif à travers des feature teams ; d'accélérer les cycles de production, autour de l’AB test, du Test & learn et du co-design. »
Au fond, cette transformation revient à faire d'AccorHotels une entreprise agile et apprenante. Maintenant que la chaîne a vendu ses murs, une orientation domine : celle de l’usage, en s’assurant que les solutions de demain seront conçues dès leur phase d’idéation avec des hôteliers, des clients, des employés, pour s’assurer de leur pleine appropriation. « Maud est à la fois capable de créer des outils et de faire de la pédagogie autour de ces solutions », opine de son côté Sébastien Bazin, qui tient les rênes du groupe depuis cinq ans. « C'est indispensable. »
Le PDG reconnaît que les dirigeants, « endormis sur leurs certitudes, n'ont pas bien vu la rupture des années 2000 et saisi l'importance de l'arrivée des agences en ligne (Expedia, Ctrip...) ou des pure players comme Airbnb, attirés par une industrie de l'hôtellerie qui est internationale et ne cesse de croître. » Mais il affirme qu'Accorhotels « ne s'est jamais aussi bien porté » et « rattrape désormais son retard ».
Au-delà de la création d'outils, le groupe s'efforce de s'ouvrir davantage aux jeunes talents au travers d'un « shadow Comex » (une sorte de comité exécutif de l'ombre) composé de 14 jeunes collaborateurs. « Nous leur donnons accès à toutes les informations confidentielles et discutons avec eux des évolutions ou des ouvertures possibles. » AccorHotels s'est en outre doté d'une cellule « disruption et croissance », qui a la lourde tâche d'identifier toutes les start-up qui émergent dans le secteur (plus de 500 ont à ce jour été répertoriées) et de sonder leur potentiel immédiat, sur la base de trois principaux critères (la qualité du management, la pertinence du business model et le territoire d'intervention).
Les témoignages de la soirée sur la digitalisation
« Upper-Link travaille avec des grands comptes sous forme de délégation d’expertise et accompagne des PME / ETI dans leur transformation Digitale.
Nous avons par exemple accompagné un fabricant de scanners de codes-barres, en butte à une forte concurrence des nouvelles apps de scan sur smartphones. Nous avons aidé ce client à identifier les axes d’innovation et à développer de nouvelles offres d'exploitation des big data générées par le processus de scan. Ce client a redressé la barre. La transformation digitale est une nécessité. Les grandes entreprises ont un droit à l’erreur alors que les PME/ETI ont beaucoup moins cette possibilité. »
René-Louis Adda, PDG d'Upper-Link, ESN française spécialisée dans la transformation digitale des entreprises.
« Le but ne doit pas être de faire du digital pour faire du digital.
Aujourd'hui, nous sommes de moins en moins dans la théorie et de plus en plus dans la pratique, avec de nombreuses innovations concrètes, en ce qui concerne la productivité, les modes d'accès, le cloud et l'information. Ce dernier point me semble essentiel : il y a aujourd'hui tellement d'informations qu'il faut apprendre à identifier automatiquement ce qui est exact et ce qui ne l'est pas. »
Daniel Jondet, membre du conseil d'administration du CRIP (Club des responsables d'infrastructure et de production).
« L'impact de la digitalisation sur les périphéries (géographiques, territoriales, sociales ou économiques) est difficile à saisir.
Certaines populations, par exemple celles qui vivent en lisière des grandes métropoles, se sentent exclues, y compris en ce qui concerne le numérique. Nous essayons actuellement d'identifier des projets qui pourraient permettre de réduire les fractures. »
Christian Doan, Responsable du pôle entrepreneuriat de l'association Expressions de France.
« Les ETI et les grands comptes font appel à Valtus pour accélérer et réussir leur transformation.
Aujourd’hui les deux tiers de nos interventions se font sur des missions de ce type, avec des dirigeants de transition experts, rompus à ces situations, que nous pouvons faire intervenir sous quelques jours, partout dans le monde, pour répondre aux besoins de rapidité d’action de nos clients. Comme, par exemple, cette multinationale française de services cotée qui a fait appel à nous pour structurer sa direction IT et opérer sa transformation digitale au niveau mondial. »
Philippe Soullier, Président de Valtus, leader européen du management de transition.
« Pour concevoir une stratégie digitale, il est indispensable d'avoir une connaissance profonde du terrain et de parvenir à segmenter chaque problème en plusieurs sous-problèmes (techniques, économique...) susceptibles d'être traités. »
Fabrice Leteinturier, consultant chez Parteck
« Nous avons choisi d'axer notre réflexion sur un métier qui nous semblait original : l'agriculture.
L'une d'entre nous travaille actuellement pour une coopérative agricole. Dans un contexte de multiplication des sources de données, nous avons conseillé à cette entreprise de centraliser davantage toutes les informations dont elle dispose, idéalement avec une nouvelle solution digitale. »
Joséphine Gérard, Léa Simonin, Marjory Houlbert et Prudence Piettre étudiantes à l'IESEG School of Management, lauréates du prix UPPER-LINK lors de l’hackathon des grandes écoles IÉSEG, ESILV, ENSIIE et IMT
Christophe Dutheil